Les oeuvres de l’esprit sont-elles simplement le réceptacle et le véhicule
d’un sens qu’on y aurait déposé, et qui se transmettrait tel quel ? Il semble
bien que non, et qu’elles aient au contraire, dans la production de
significations et d’émotions, un rôle propre à jouer, par leur insertion dans
des dispositifs socialement ajustés, mais aussi par leurs qualités propres, y
compris et surtout leurs qualités formelles. C’est de cette capacité de faire
sens qu’il est ici question, à propos des oeuvres de cinéma. La thèse centrale
de cet ouvrage est que les films, s’ils ne «pensent» pas comme les humains, ont
cependant, par leur jeu sur les propriétés des images mouvantes, la capacité de
produire des sens neufs – et que la tâche première de toute théorie de l’analyse
de film est de s’attacher à cette précieuse aptitude à l’invention.